Login

Bretagne : le réseau des lycées agricoles cultive le bio

Hortibio, le réseau de l'enseignement agricole public de Bretagne, joue plusieurs partitions : les productions bio, les essais et expérimentations pour les producteurs, l'appui aux cours pour les enseignants, la mise en situation pour les élèves...

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Favoriser les échanges au sein du réseau Hortibio et développer des expérimentations en horticulture biologique, c'est la mission qui a été confiée à Xavier Dumas depuis septembre 2009. Le réseau Hortibio, créé en 2007 par les directeurs d'exploitation de quatre établissements d'enseignement agricole bretons, est constitué des établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole (Eplefpa) suivants : Châteaulin-Morlaix-Kerliver, dans le Finistère ; Rennes-Le Rheu, en Ille-et-Vilaine ; Saint-Jean-Brévelay-Hennebont, dans le Morbihan ; et Merdrignac, dans les Côtes d'Armor. Il reçoit le soutien de la direction régionale de l'agriculture. L'ensemble de ces structures dispose d'exploitations qui produisent des légumes, des plantes ornementales, des végétaux de pépinière et des plantes à parfum, mais également des plantes aromatiques et médicinales (PPAM). Selon les sites, les productions sont en partie ou en totalité certifiées en agriculture biologique.

1 PARTAGE DES TECHNIQUES ET MONTAGE DES DOSSIERS.

Les responsables des sites d'exploitation de ces lycées n'ont pas attendu 2007 et la création d'Hortibio pour développer des échanges... Ils partageaient déjà des techniques de production de plants et de légumes en agriculture bio. La naissance officielle du réseau Hortibio, puis l'arrivée d'un coordinateur ont permis de renforcer les liens et de développer les expérimentations. « Le montage des dossiers et le plan de financement sont plus faciles à mettre en oeuvre », affirment les responsables d'exploitation. L'animateur réalise aussi une veille scientifique plus régulière, dont il fait profiter enseignants et responsables d'exploitation.

2 EXPÉRIMENTATIONS ET FINANCEMENTS.

Au sein du réseau, les pistes d'expérimentations sont variées : évaluation variétale (tomates, aubergines, poivrons), développement de nouveaux itinéraires techniques performants (évaluation de différents modes de désherbage mécanique en plein champ pour cultures de PPAM), lutte contre les pucerons en culture sous abri, évaluation d'un entomopathogène Beauveria bassiana V. pour combattre l'aleurode Trialeurode vaporarium en culture sous abri, évaluation de terreaux sans tourbe... Mais « le réseau ne dispose pas de fonds propres », souligne Xavier Dumas. Il lui faut rechercher des financements auprès des régions, de l'État ou de l'Europe, après avis de la coordination interprofessionnelle des travaux de recherche et d'expérimentations en agriculture biologique (Cirab) de la région Bretagne. La Cirab évalue la pertinence des programmes. Des financements peuvent également être obtenus auprès de partenaires privés. Les essais en plantes à parfum, aromatiques et médicinales peuvent bénéficier du soutien de l'Iteipmai, organisme professionnel de recherche spécialisé dans ce domaine, qualifié par le ministère de l'Agriculture et agréé par le ministère de la Recherche. Pour des programmes de recherche concernant l'horticulture ornementale biologique, cela reste plus difficile, car le domaine est encore peu exploré.

3 PRODUCTIONS ET DEMANDE EN HAUSSE.

« Si les exploitations des lycées agricoles ont une mission d'appui pédagogique pour les enseignants, elles doivent trouver un équilibre financier », souligne Philippe Mahé, responsable de l'exploitation à Saint-Jean-Brévelay. En effet, elles fonctionnent comme des entreprises privées et les salariés sont sous un régime de droit privé. Ces dernières années, le coût des intrants (matières premières, fertilisants, eau) a fortement augmenté. Il faut donc aujourd'hui des rentrées d'argent supplémentaires... Heureusement le légume bio est en pleine expansion en Bretagne, aussi bien au niveau de la demande des particuliers, qui développent des potagers dans leurs jardins, que chez les professionnels, avec un nombre croissant de jeunes maraîchers qui s'installent en agriculture biologique.

Sur le site de Saint-Jean-Brévelay, la demande de jeunes plants de légumes est exponentielle : entre mai 2010 et mai 2011, la production a doublé. Sur celui de Merdrignac, il existe une volonté politique de développer la production bio, qui conduit à une augmentation de la demande.

4 RENTABILITÉ ET VOCATION PÉDAGOGIQUE.

La production de plants et de légumes bio permet donc des rentrées financières intéressantes à l'inverse de la floriculture et, dans une moindre mesure, des produits de pépinières. « L'argumentaire en faveur des plantes ornementales bio est moins aisé à développer que pour des cultures vivrières », souligne Xavier Dumas. Il faut mettre en avant l'engagement environnemental global, la biodiversité et le bien-être des producteurs qui n'ont plus à manipuler des produits dangereux. Mais pour les acheteurs, cela a moins d'impact que la consommation, par exemple, de produits exempts de traitements chimiques...

Seule production qui semble tirer son épingle du jeu, aux frontières du maraîchage et de l'ornement : les PPAM.

La difficulté, pour les sites d'exploitation, consiste à trouver un équilibre entre le développement des productions rentables et le maintien de celles qui le sont moins, mais qui doivent être maintenues pour des raisons pédagogiques : annuelles et bisannuelles, plantes à massif...

5 CONTACTS ET ESSAIS CHEZ LES PRODUCTEURS.

Les contacts avec les producteurs locaux sont plus ou moins développés, en fonction du type de production et de la situation géographique du site d'exploitation.

Ainsi, à Merdrignac, la production locale ornementale et maraîchère est peu présente. Il existe un important producteur ornemental dans le secteur, mais il n'est pas engagé en agriculture biologique. En outre, il ne souhaite pas développer les contacts avec le lycée, qu'il considère comme un concurrent « déloyal ».

En revanche, à Saint-Jean-Brévelay, la proximité du siège du groupement d'agriculteurs biologiques (Gab) de Bretagne favorise les relations avec les professionnels. Ces derniers participent à certaines expérimentations, accueillent des stagiaires en formation, échangent avec le coordinateur.

À Morlaix, l'environnement est également favorable, car il existe un vivier de producteurs particulièrement en maraîchage. En revanche, dans le secteur de la floriculture et de la pépinière, les contacts sont peu nombreux, très peu d'exploitations étant développées en agriculture biologique.

L'appui du réseau Hortibio permet de réaliser certaines expérimentations au sein des lycées et chez des producteurs. C'est le cas, par exemple, de l'essai de comportement variétal effectué en 2010 sur les tomates, à Morlaix. Il associe cinq producteurs installés en territoire breton, dans des contextes pédoclimatiques différents.

6 ÉVALUATION DE TERREAUX SANS TOURBE.

Un essai a été mis en place en 2011 et pour trois ans sur l'évaluation de terreaux sans tourbe pour la production de plants de légumes biologiques. Les plants sont produits sur les sites de Merdrignac, Châteaulin et Saint-Jean-Brévelay. La mise en production des légumes se fait à Morlaix. Différents types de fibres végétales (chanvre, bois, écorces compostées) et divers composts (déchets verts, fientes de volaille) ont été mélangés pour concevoir ces terreaux. Les premiers résultats tendent à montrer qu'aucun des terreaux sans tourbe évalués n'est aussi performant que les témoins tourbeux du commerce utilisés lors de l'essai. Cependant, certains d'entre eux ont donné des résultats satisfaisants.

Cette première phase d'essai a donc permis d'identifier des compositions intéressantes, qui seront affinées et réévaluées au cours des prochaines années. Dans un deuxième temps, les résultats de cet essai pourraient être utilisés pour les productions ornementales.

Yaël Haddad

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement